L'emploi précaire ou atypique et les travailleurs vulnérables

Le monde du travail est en constante évolution. Les employeurs adaptent leurs entreprises et leurs services pour demeurer concurrentiels dans une économie globale, et les travailleurs doivent s'adapter de façon similaire pour répondre à ces besoins. Au cours des dernières années, les travailleurs qui profitent d'une situation d'emploi traditionnelle typique sont de plus en plus rares, et on observe un accroissement rapide de la proportion des travailleurs qui ont un emploi atypique.

L'emploi conventionnel est défini comme une situation où un travailleur est l'employé d'un seul employeur, à plein temps, sur une base permanente, et reçoit un salaire et des avantages sociaux décents et profite d'une protection efficace des organismes réglementaires. [Source : Precarious Employment, L. Vosko, (2006)]

L’emploi atypique est un terme général désignant différentes modalités d’emploi qui s’écartent de l’emploi standard et qui est caractérisé comme temporaire ou occasionnel, sans avantages sociaux, sans certaines protections juridiques, et peut être associé à un faible revenu. En général, l’emploi atypique comprend l’emploi temporaire, le travail à temps partiel ou sur appel, l’emploi multipartite (p. ex., travailleur d’agence temporaire) ou l’emploi déguisé et les entrepreneurs dépendants (p. ex., les travailleurs sur demande au moyen d’une application ou d’une plateforme Web).

L’Organisation internationale du Travail reconnaît également que le travail à domicile est un régime de travail atypique, car le travail à distance ne se fait pas au lieu de travail de l’employeur, mais plutôt au domicile du travailleur. Aux fins du présent document de Réponses SST, nous nous penchons sur les emplois précaires et vulnérables (voir les définitions ci-dessous). Pour de plus amples renseignements sur le télétravail, veuillez consulter nos Réponses SST intitulées Télétravail / Travail à distance / Travail à domicile.

Le travail précaire désigne le travail où le travailleur assume le risque de l’emploi. Selon l’Organisation internationale du Travail, la précarité s’entend de caractéristiques d’emploi risquées comme un faible salaire, une continuité d’emploi incertaine ou un risque élevé de perte d’emploi, un choix limité ou inexistant de conditions de travail et peu de protections d’emploi [Source : Organisation internationale du Travail. (2016) Non-standard employment around the world : Understanding challenges, shaping prospects].

L’économie à la demande est fondée sur le travail temporaire ou à la pige. Les travailleurs à la demande sont des travailleurs qui ont des contrats à court terme ou qui concluent des ententes de travail plus occasionnelles qui sont habituellement facilitées par des plateformes de main-d’œuvre numérique (p. ex., Uber, Lyft, SkipTheDishes, Upwork, Taskrabbit, etc.) [Tiré de : Emploi et Développement social Canada. (2023) Ce que nous avons entendu : Améliorer les mesures de protection des travailleurs pour les travailleurs à la demande]. Les travailleurs à la demande sont généralement considérés comme des travailleurs autonomes plutôt qu’employés ou travailleurs.

Les travailleurs occupant un emploi atypique ou précaire peuvent également être appelés travailleurs vulnérables.

Partout au Canada, des travailleurs subissent les conséquences négatives causées par certaines lacunes législatives et politiques. En raison de leurs conditions d'emploi, ils n'ont pas accès aux protections liées à l'emploi, comme la santé et la sécurité au travail, les normes du travail et les prestations d'assurance-emploi.

Par conséquent, l'emploi précaire ou atypique et les problèmes auxquels doivent faire face les travailleurs vulnérables ont fait l'objet d'un examen général et de recommandations de haut niveau. Par exemple, une étude réalisée en Ontario par la Commission du droit de l'Ontario a montré que l'emploi précaire comporte des conséquences considérables, au-delà du simple travailleur vulnérable, à un point tel que nous observons maintenant l'apparition de ménages précaires et de communautés précaires.

De même, le Programme du travail, par l’entremise d’Emploi et Développement social Canada, a également mené un examen visant à élaborer de meilleures mesures de protection de la main-d’œuvre pour les travailleurs à la demande relevant de la compétence fédérale.

Il existe de nombreuses interprétations de la vulnérabilité du travailleur. De façon générale, lorsqu'il est utilisé dans un contexte de santé et de sécurité au travail, un travailleur vulnérable désigne les travailleurs plus susceptibles de se blesser au travail.

Une étude de l'Institute for Work and Health (IWH) a établi quatre dimensions de la vulnérabilité menant à un risque accru de blessure :

• Les dangers auxquels font face les travailleurs.
• La protection au niveau de l'organisation ou du milieu de travail auquel ils ont accès sous forme de politiques ou de pratiques.
• La sensibilisation aux responsabilités et aux droits relatifs à la santé et à la sécurité.
• La mesure dans laquelle ils ont le pouvoir de prendre part à la prévention des blessures liées au travail et de refuser un travail dangereux.

À la suite de leur étude, l'Institute for Work and Health (IWH) a mis au point un outil de mesure de la vulnérabilité pour évaluer la vulnérabilité d'un travailleur face aux blessures ou aux maladies en milieu de travail. Selon leur recherche, la vulnérabilité est associée à des taux élevés de maladies et de blessures signalées par le travailleur.

Cette approche favorise une prise de conscience du fait que la vulnérabilité peut être changée grâce à la prévention, plutôt que de détecter la vulnérabilité à partir de facteurs invariables, comme le statut de nouveaux immigrants, les jeunes travailleurs, etc. L'IWH fait la promotion d'une perspective qui se penche sur la manière dont un travailleur est vulnérable, et non pas uniquement sur qui est le travailleur vulnérable.

D'autres interprétations du concept de travailleur vulnérable sont plus larges et englobent les relations circulaires avec l'emploi précaire, ce qui signifie qu'un travailleur vulnérable est une personne qui détient un emploi précaire.

Plusieurs termes sont utilisés pour décrire les formes et les arrangements les plus courants du travail ou emploi précaire que vivent les travailleurs. Parmi ceux-ci figurent la flexibilisation du travail, et le travail atypique, alternatif et non conventionnel. Les définitions de l'emploi précaire varient également, et chaque définition comporte des caractéristiques légèrement différentes. L'expression « emploi précaire » désigne les expériences de travail associées avec l'instabilité, l'absence de protection et la vulnérabilité socio-économique. La caractéristique commune entre la plupart des définitions d'emploi précaire est le faible revenu.

La Canadienne Leah Vosko, experte en la matière, utilise la définition suivante dans son livre intitulé « Precarious Employment » : [traduction libre] L'emploi précaire est formé par le statut d'emploi, la forme d'emploi, et les dimensions telles que le faible revenu, et le peu de contrôle sur le processus de travail, de même que le contexte social et la situation sociale.

L'emploi précaire touche de nombreuses personnes, mais certains groupes de travailleurs sont touchés de façon disproportionnée, directement et négativement. La Commission du droit de l'Ontario note que les femmes, les personnes racialisées, les immigrants, les Autochtones, les personnes qui souffrent d'un handicap, les aînés et les jeunes sont représentés de façon disproportionnée dans la catégorie des travailleurs vulnérables.

En Alberta, par exemple, des catégories précises de travailleurs comme ceux qui travaillent dans le domaine de l'agriculture sont explicitement exclues de la législation ouvrière. Cette exclusion signifie que les travailleurs agricoles ne sont pas protégés contre les représailles s'ils refusent d'exécuter des travaux dangereux ou s'ils déposent une plainte sur les conditions de travail non sécuritaires.

Dans d'autres situations, une simple interprétation juridique pourrait permettre à certaines pratiques d'emploi d'éviter les exigences dans une relation de travail conventionnelle.

Des études ont montré que de nombreuses conséquences négatives sont attribuables à l'emploi précaire et plus précisément au travail temporaire. Selon un rapport de Poverty and Employment Precarity in Southern Ontario (PEPSO), l'emploi précaire affecte la participation à la communauté, crée de l'isolement social et mène souvent à une baisse de la participation dans les processus démocratiques comme les votes.

On y note également que, selon la documentation, les travailleurs qui expérimentent l'emploi précaire :

• sont plus souvent exposés à des milieux de travail dangereux, à des conditions de travail stressantes sur le plan psychosocial, à une charge de travail plus élevée et à des heures supplémentaires non payées;
• souffrent d'un plus haut taux de blessures liées à la santé et à la sécurité au travail;
• ressentent des effets néfastes sur la santé;
• doivent composer avec plus de conflits entre le travail et la vie privée;
• sont moins susceptibles de recevoir la formation appropriée pour les tâches qu'ils doivent effectuer;
• sont moins susceptibles d'être membres de syndicats;
• sont moins protégés en raison des limites, des lacunes et des interprétations exclusives de la loi.

Il faut noter que la recherche tend à se pencher sur un aspect de l'emploi précaire, soit les perceptions d'insécurité d'emploi, pour évaluer les effets sur la santé. Certaines études élargissent leurs domaines de recherche à mesure que notre compréhension des répercussions de l'emploi précaire s'améliore, notamment en ce qui concerne la façon dont ces expériences affectent les personnes et les communautés.

Parmi les ressources supplémentaires figurent les suivantes :

• Du travail précaire au travail décent, Organisation internationale du Travail
• Non-Standard Employment Around the Work, Organisation internationale du Travail
• Quick Facts About Vulnerable Workers and Precarious Work, Commission du droit de l'Ontario
• Association canadienne pour la santé mentale

(*Ces organisations sont données à titre de référence seulement. Vous devriez communiquer avec elles directement pour obtenir de plus amples renseignements sur les services offerts. Veuillez prendre note que le fait de mentionner ces organisations, par rapport à d'autres que vous pourriez connaître, ne constitue pas une recommandation ou une approbation de celles-ci par le CCHST.)